Crédit photo : KHYF Photograph Archives

La pratique des Bandhas est un sujet qui me passionne. Les Bandhas n’ont rien de divins ni de spirituels. Ils sont bien au contraire extrêmement concrets. Pouvoir pratiquer les Bandhas revient à une pratique en pleine conscience et éveillée.

De manière générale on ne parle que de trois Bandhas :

Mula Bandha (Bassin, Plancher Pelvien, Périnée. « Mula » se traduisant par « Racine »).

Uddiyana Bandha (Organes abdominaux, diaphragme, estomac. « Uddiyana » se traduisant par « voler vers, s’élever »).

Jalandara Bandha (Gorge, cou, cervicales. « Jal » se traduisant par « gorge » et « Dharan » par « courant »).

Le 4ème Bandha est l’activation des trois bandhas ensemble par la pratique de Kumbakha (rétention d’air poumons pleins ou poumons vides) se nomme « Maha Bandha » ou le Grand Verrou.

Un Bandha est traditionnellement traduit par « Verrou ». Quand on nous l’explique bien souvent on nous parle de circulation du prana que l’on « bloquerait » à un endroit donné entre Mula Bandha et Uddiyana Bandha. En fermant ou ouvrant le verrou on pourrait faire circuler le Prana (énergie vitale) comme on le souhaiterait de Mula à Uddiyana puis Jalandara Bandha. Les Bandhas sont la porte d’accès à l’activation des Chakras qui nous amèneraient ensuite au réveil du Kundalini. Le but ultime étant de faire de nous des êtres éveillés.

C’est je dirai la pratique la plus avancée des Bandhas. C’est une pratique qui ne peut s’apprendre sur des ateliers d’un weekend ou d’un mois. Lorsque vous commencez « à jouer » avec les énergies, il faut être prêt et avoir un bon professeur qui vous accompagne dans cette démarche.

Il y a aussi une toute autre manière de pratiquer les Bandhas en les démystifiant un peu sans pour autant mettre de côté leurs vrais potentiels.

Sachant qu’un Bandha est par définition un verrou, le fait de prendre un sac et de fermer le poing pour le saisir est l’activation d’un Bandha. Nous activons ici le Bandha de la main que l’on pourrait traduire par Hasta Bandha, ce qui fait du sens lorsque l’on sait que nous n’avons pas seulement 7 chakras répartis le long de la colonne vertébrale (qui pourraient nous rappeler le fonctionnement du système nerveux) alors que nous avons des chakras répartis sur toutes les articulations de notre corps ainsi que dans le creux de la main, entre les doigts, sous les pieds etc. ce qui portent le nombre à 114 Chakras pour 72000 Nadis et 9 Bandhas (ou plus si l’on considère que nous avons deux poignets, deux genoux etc).

Pour référence vous pouvez vous procurer les écrits de Simon Borg ou de Sadhguru.

De ce fait il est bien entendu que dès lors que l’on rentre dans cette dimension du mouvement et de conscience de notre corps on s’aperçoit et surtout on comprend que notre corps est électrique, qu’il roule à l’énergie et que si tous les êtres humains étaient connectés ensemble et surtout éveillés nous n’aurions plus besoin d’énergie extérieure comme le nucléaire par exemple car nous serions capable de la générer nous mêmes.

Les Bandhas dans la pratique du yoga

Krishnamacharya – Yoga Mudrasana

Il est très intéressant de se pencher sur les pratiques de Krishnamacharya, Pattabhi Jois, BKS Iyengar, Sharat R. Jois.

En tant qu’occidentaux la première chose que l’on voit, que l’on remarque lorsque l’on regarde les photos est le « manque d’alignement« , je mets ce mot en italique car pour pouvoir justifier d’un manque d’alignement il faudrait d’abord définir ce qu’est un « bon » alignement versus un « mauvais » alignement. Si ce n’est notre jugement personnel bien souvent trop critique comment pouvons nous dire qu’une pratique est meilleure qu’une autre?

J’ai lu des commentaires terribles sur une vidéo que Sharat Jois avait fait quand il expliquait une transition à partir de Virabhadrasana II. Au lieu de regarder la pratique dans son ensemble les gens discutaient de son manque d’alignement dans la posture son genou ne tenant pas le sacro-saint alignement que l’on entend partout dans les formations ou dans les cours « genou plié à 90° » au dessus des orteils. Ses jambes n’étaient pas « assez » ouvertes aux dire des pratiquants qui se trouvaient derrière leur écran et tout le monde y allait de son petit commentaire….

Récemment lors d’un cours d’anatomie où l’on examinait la séquence de la deuxième série, des étudiants remettaient en question l’alignement de Pattabhi Jois quant à son Chaturanga Dandasana, ses coudes ne suivant pas l’alignement suprême le long du corps mais légèrement à l’extérieur. Sur ce le professeur a demandé aux élèves à partir d’où le mouvement devait être « ressenti » si l’on parle de ressenti extérieur et la plupart ont répondu que c’étaient justement les bras…. or cela devrait être le centre, soit Uddiyana Bandha, soit les abdominaux. Si l’on a mal aux bras pendant Chaturanga c’est tout simplement que l’on utilise que la force physique extérieure, au lieu d’utiliser les Bandhas.

Disons le l’Ouest a vendu son âme à l’alignement ultime.

Je suis infiniment reconnaissante des possibilités qui me sont données de pouvoir pratiquer avec des Yogis qui sont sur ce chemin depuis plus de 20 ans. C’est incroyablement rafraichissant d’entendre des phrases comme « il vaut mieux plier les genoux et arrondir le dos », de comprendre que l’alignement n’est pas un but en soi l’important étant d’habiter la posture et de développer une relation entre nous et notre pratique d’asana. Si elle est douloureuse alors elle n’est pas bonne car on ne doit pas forcer le corps et notre mental à aller dans une direction qui ne nous convient pas.

On ne peut pas faire rentrer un éléphant dans un trou de souris. En revanche on peut agrandir l’entrée à la taille de l’éléphant. Ce qui reviendrait à dire que la posture doit nous aller comme un gant et ce gant ne sera pas le même pour tout le monde.

Du coup pour revenir à la pratique des Bandhas, on déblaie tout ce que l’on croit savoir et on repart sur un terrain neutre.

Le simple fait de presser les mains sur le sol dans Urdhva Uttanasana (ou Ardha Uttansana) est un Bandha, on active le bandha du poignet (Mani Bandha) et celui de la main (Hasta Bandha). On pourrait aussi ajouter le « Pada » Bandha qui serait le Bandha du dessous du pied car il est important de s’ancrer sans pour autant s’écraser vers, dans les postures debout.

  1. Kulpha Bandha (Cheville)
  2. Janu Bandha (Genou)
  3. Kati Bandha (Hanche)
  4. Mula Bandha (Partie basse de la colonne vertébrale)
  5. Uddiyana Bandha (Poitrine et cage thoracique)
  6. Jalandara Bandha (Cervicale, cou)
  7. Hamsa Bandha (Epaule)
  8. Kurpara Bandha (Coude)
  9. Mani Bandha (Poignet)

Source : Le merveilleux blog de Antony Grim Hall.

Hasta et Pada Bandhas ne font pas partie de cette liste, je me permets d’en parler suite à mon ressenti personnel pendant mes pratiques.

Kulpha Bandha va être intéressant de ressentir dans une posture comme Trikonasana A ou B par exemple. Est-ce que l’on pense à établir de l’espace entre la cheville et le genou ? Est-ce que sciemment nous faisons circuler l’énergie de Kulpha à Janu Bandha, est-ce que d’une posture pranique on peut la transformer en posture apanique ? Ou bien tout simplement pouvoir activer les deux forces dans un sentiment d’allongement.

Entre Kati Bandha et Mula Bandha beaucoup de choses peuvent se passer pendant les flexions avant. Une flexion avant est par définition une posture de fermeture, en revanche la partie postérieure de notre corps continue de s’ouvrir. De Mula à Uddiyana Bandha même si l’on est dans une flexion avant on essaiera tout de même de créer de l’espace entre le  bassin et les côtes. Cela ne veut pas dire que l’on souhaite faire un « dos plat » pour autant, en arrondissant la partie postérieure on arrive à étirer le devant du corps. Le mouvement devient alors interne et non externe. On commence alors à bouger de l’intérieur vers l’extérieur par la respiration.

Le ressenti sera beaucoup plus subtil, au lieu d’avoir la sensation d’allonger le bas du dos on aura une sensation de travail abdominal beaucoup plus marqué et présente. Une pratique d’asana en utilisant les Bandhas doit nous faire ressentir notre centre ou ce que l’on appelle le « core », les muscles abdominaux. Il est donc plus que primordial de respirer correctement, chaque mouvement doit être accompagné d’une respiration.

Ce n’est pas tant le travail des quadriceps qui sera à l’honneur dans Uttitha Hasta Padangustasana que celui du centre qui s’active pour nous permettre de monter la jambe.

Mani Bandha va nous faire travailler de manière différente tous les équilibres ou simplement Adho Mukha Svanasana. Si l’on ressent cette posture essentiellement dans les épaules ce n’est pas tant un problème de souplesse que de la manière dont le poids est réparti entre Mani (poignet) Kurpara (coude) Hamsa (épaule) et Kulpha (cheville). Il devient alors intéressant de pouvoir déplacer l’énergie, peut être faut-il arrondir le dos et pousser les mains contre le sol mais dans une direction verticale plutôt qu’horizontale. Comment le savoir ? La pratique. Le meilleur « cobaye » est votre corps.

La pratique devient alors organique. On ne pense plus tant à avoir un dos plat, des jambes tendus, on commence à travailler en profondeur avec nos os, nos organes.

En commençant à utiliser nos ressources internes on sauvegarde notre énergie. On travaille moins avec les muscles extérieurs. La pratique devient alors consciente.

Les dristhis sont aussi essentiels car ils évitent que notre regard donc notre esprit parte dans tous les sens. Le Drishti ou point de focus permet de rassembler son attention sur un point donné. Les Bandhas permettent de travailler de l’intérieur.

En combinant la respiration, les bandhas et les drishtis on devient centré et concentré.

Namaste!