J’ai commencé la pratique du yoga en 1998. Je l’enseigne depuis presque 13 années.

J’ai mis énormément de temps avant de vouloir devenir professeur de yoga, et une fois « professeur », j’ai pris deux années de plus avant de vouloir l’enseigner tant la tâche me paraissait ardue.

Quand je pars pratiquer avec mon professeur, je suis avant tout son élève. Je ne me présente pas à lui en tant que professeur et lorsque je le recommande à d’autres élèves, si tant est ils doivent « me référencer » je leur demande le le faire comme amie et non pas comme professeur.

Je ne me considère pas comme inférieure ni supérieure à mon professeur, je suis son élève.

Lorsqu’il me dit de placer mon pied d’une certaine manière, je ne discute pas, je le fais.

Lorsque Sharat Ji me demande de placer le pied, pour la même posture, d’une autre façon, je ne discute pas, je le fais.

J’ai confiance en leur savoir, je respecte leurs pratiques et leurs connaissances et jamais je ne mets en doute ce qu’ils me disent. Jamais je ne les compare. Jamais je ne compare leur enseignement avec ce que je pense savoir en amont. Je reste une page blanche et je reçois leurs connaissances.

Recevoir un enseignement

On reçoit un enseignement avant tout. Pour le recevoir de la bonne manière il faut savoir rester neutre. Accepter les nouvelles connaissances, les comprendre ou pas, les assimiler ou pas, être d’accord ou pas. Nous avons le libre arbitre de penser ce que nous voulons.

En revanche pendant la durée de l’enseignement, si l’on veut qu’il soit efficace, il faut apprendre à ne pas comparer ce que nous savons déjà. Ce processus se fera après, pas pendant.

Le respect envers l’enseignant

Que l’on soit déjà professeur de yoga ou simple novice, lorsque l’on souhaite suivre l’enseignement de quelqu’un, on le fait sans que personne ne nous y oblige, on y va de notre bon vouloir.

De moins en moins maintenant, mais auparavant j’ai souvent été confrontée à des élèves qui « savaient déjà tout »…. par la même occasion remettaient en cause mes mots, mes actions, mes connaissances, devant le groupe ou bien en me prenant à partie.

De vous à moi, je n’ai jamais compris cette démarche d’argumentation.

Lors de ces discussions parfois houleuses, j’inversais la situation dans ma tête en me disant, que jamais je ne pourrai faire ça avec mon professeur, car je le respecte.

Au début j’essayais de faire valoir mon point de vue, ce qui remettait en doute mon expérience de ces vingt dernières années, face à des étudiants qui pratiquaient depuis deux ans…… je me suis rendue compte que cela n’en valait pas la peine. C’était une pure perte d’énergie et psychologiquement parlant ces situations ne m’élevaient pas.

« Mes élèves »

Il y a des étudiants qui affichent la couleur tout de suite. Lorsqu’ils vous posent des questions ils commencent par « mes élèves font ça, et je leur dis de faire ça comme ça ». Ils ne vous demandent pas votre opinion, ils font juste référence à leur méthode d’enseignement.

D’autres, vous demandent des conseils qu’ils pourraient proposer à leurs élèves pour rentrer dans telle ou telle posture, alors que fondamentalement ils n’y arrivent pas eux-mêmes.

D’autres encore, vous écoutent, mais au moment de la pratique restent sur leurs bases et leurs connaissances déjà acquises. C’est une réaction silencieuse qui sous-entend le savoir absolu….

Ou encore, le top, ces personnes enseignent leur façon de faire, aux élèves qui sont venus apprendre avec vous. Vous vous retrouvez donc avec des élèves qui souhaitent suivre votre enseignement, et d’autres qui visiblement n’en font qu’à leur tête et décident de prendre les choses en mains à votre place.

L’échange est important

On apprend beaucoup de nos élèves, je le dis souvent, et souvent cette phrase est mal interprétée. Pour certains, elle est synonyme de « je vais te montrer comme JE fais pour t’apprendre ».

Tout échange entre élève et professeur doit pouvoir se faire sans ego.

Le professeur n’a pas la science infuse, certes, mais il n’est pas non plus complètement ignorant. Il faut pouvoir prendre et accepter ce qu’il propose, et ensuite faire le tri si nécessaire. En revanche cela ne devrait pas se faire pendant la période d’enseignement, mais seulement une fois que l’enseignement est terminé.

A titre d’exemple, vous avez deux boulangeries, une nouvelle qui vient d’ouvrir, et une autre chez qui vous allez tous les jours. Vous décidez de comparer leurs pains. Vous allez donc acheter une baguette chez « A » et une autre chez « B », le même jour.

Vous commencez la baguette « A » et tout de suite vous goûtez la baguette « B ». Puis vous revenez à la baguette « A » pour la comparer à nouveau avec la « B ».

Au final les deux baguettes seront à moitié mangées, vous aurez engloutit l’équivalent d’une baguette mais aucune des deux ne sera terminée. Vous serez alors à mi-chemin du savoir et de l’ignorance.

Vous ne pourrez pas décider laquelle vous avez aimé le plus, car jamais vous n’aurez donné la chance à l’une d’entre elle de vous satisfaire complètement.

C’est dommage, car au final vous aurez dépensé de l’argent pour rien.

Au lieu d’accueillir à bras ouverts les nouvelles saveurs, vous avez perdu votre temps à rechercher le goût des anciennes dans la nouvelle.

Au lieu de satisfaire pleinement votre estomac, vous l’avez rempli à moitié d’acidité.

C’est la même chose lorsque vous vous dirigez vers un professeur qui au demeurant vous plait, mais pour lequel vous refusez de vous présentez avec une page blanche à écrire.

Vous perdez votre temps à raturer les nouvelles connaissances, en essayant de vouloir les faire rentrer dans ce que vous croyez déjà connaître.

Il n’y pas de complémentarité, car vous ne laissez pas la porte ouverte.

Vous avez la clef, mais la serrure est rouillée. 

A vous de voir….

Namaste!