L’art du Détachement

Aujourd’hui j’ai commencé à envoyer mes affaires, pour la plupart des vêtements et quelques bouquins en France. Puis en rentrant je me suis rendue compte que j’avais encore des vêtements dont je ne savais pas quoi faire.

J’ai demandé aux étudiantes si elles seraient intéressées, elles m’ont dit oui. Alors, j’ai sorti mon gros sac et j’ai commencé leur montrer ce que j’avais. Pendant que je regardais mes vêtements passés de mains en mains je me suis mise à penser malgré moi « ce pantalon je l’ai acheté il y a trois ans à Paris après notre formation, cette robe je l’ai achetée au Cambodge sur le marché, ce haut rouge je l’ai acheté à Goa il y a quatre ans »…..

Quand je suis rentrée dans ma chambre je ne savais pas si j’étais heureuse ou si je me sentais vide.

C’est une histoire qui s’est tellement répétée. Quand j’ai vendu mon appartement en 2014 j’ai vendu (ou donné) tout ce qu’il y avait dedans, du lit aux draps, de la cafetière aux tasses de café, de la TV aux DVDs (TV que je n’ai jamais utilisé), de l’aspirateur aux serviettes de toilettes, bref tout. Quand l’acheteur a pris possession de l’appartement il n’avait qu’à venir avec ses valises de la petite cuillère à l’huile dans le placard tout était là.

De la même manière quand j’ai déménagé du Canada pour revenir en France j’ai complètement vidé mon appartement, j’avais même organisé une journée porte ouverte où j’ai vu des gens que je ne connaissais pas fouiller dans mes placards, bouger les meubles, peser et sous peser la vaisselle, marchander, acheter puis partir avec.

A chaque fois j’ai eu l’impression de donner une partie de moi, une partie de mon passé.

La première  transition je l’ai vécue en 1998 quand j’ai obtenu ma résidence permanente et que je suis partie m’installer au Canada. J’avais 24 ans à l’époque, égoïste ce qu’il faut et je m’en foutais. C’était mon moment, je n’avais aucune idée de ce qui m’attendait, pas d’amis sur place, pas de travail, aucune notion de ce que pouvait être un hiver canadien, la seule chose dont j’étais certaine était ce papier agrafé dans mon passeport qui me donnait le droit de partir et de rester sur place.

Sept ans plus tard, sept hivers plus tard, je suis revenue en France. Pour le coup ce fut très difficile mais j’ai survécu!

Neuf ans plus tard deuxième transition, cette fois de Paris vers l’Inde. Je n’ai pas vraiment compris ce que je faisais, je répondais à une urgence latente, je l’ai fait sans hésitation et sans regret.

Quatre ans plus tard je recommence, de Mysore à plusieurs petits arrêts (comme Colombo, Pattaya, Ubud et Canggu) avant d’atteindre Montréal en Mai 2018. Cette transition est plus irréelle car je n’en reviens pas que ça arrive ENCORE !

Dans mes rêves les plus fous j’ai toujours pensé que pour mes 40 ans je serais enfin stabilisée quelque part.

Je vais tranquillement vers mes 44 ans et en-dehors de ma pratique régulière et quasi religieuse de l’Ashtanga Yoga je n’ai absolument aucune stabilité dans ma vie.

Alors oui je pourrai la faire rebelle et clamer haut et fort « je suis libre, c’est moi qui ai raison, pendant que tout le monde est marié avec des enfants regardez moi danser sous la pluie, regardez mon indépendance »…. mais non…. loin de moi cette idée. Je connais pas mal de personnes qui sont mariés avec des enfants, un travail des plus réguliers de 8.00 à 6.00 PM et qui sont super contents !

Je ne vais pas non plus célébrer les bobos chics qui vendent leur vie de backpackers à travers le monde (s’ils sont français vous avez une chance sur 2 pour qu’ils touchent le chômage alors qu’ils sont au bout du monde) parce que ce n’est pas pour tout le monde et surtout parce que ça ne tient qu’un temps.

Je souhaite juste méditer sur la phrase d’Albert Camus « Et jamais je ne me suis jamais senti si profondément autant détaché de moi-même et si présent dans le monde ».

Techniquement je n’ai absolument aucune idée de la raison pour laquelle je n’arrive pas à me trouver un « chez moi » comme tout le monde.

Ne vous méprenez pas, je ne suis pas triste ou dépressive.

Je suis heureuse d’aller de l’avant, le tout est encore très incertain mais je sais que tout ira bien.

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