Authentic vintage handwritten letters on a rustic table with pens.

Lettre ouverte au professeur de yoga

A l’heure où la communauté de l’Ashtanga Vinyasa Yoga pleure la perte soudaine de Sharath Jois, le 11 novembre dernier, d’une crise cardiaque, les hommages pleuvent sur la toile.

Avez-vous vu passer celui-ci ?

Lettre ouverte au Professeur de Yoga, qui a surfé sur la vague hommage faite à Sharath,

A toi qui a souhaité me partager, et ce bien bien malgré moi, j’aurai préféré ne pas savoir, ton avis bien tranché sur le sujet.

Je reste estomaquée de notre échange sur Instagram. Ton manque d’empathie est édifiant, tout comme ton opportunisme me font saigner les yeux et les oreilles face à ton discours. Lors de mon premier message je corrigeais le fait que Sharath n’était pas décédé directement après avoir donné un cours, très théâtrale certes, digne d’un Molière ou d’un bon Feydeau, mais lors d’un trek avec ses élèves en Virginie, USA. Ce à quoi tu m’as répondu :

« Oui, enfin il est mort. Comme quoi le yoga ne nous protège pas de faire un infarctus à 53 ans »….

Premier red flag. Je me suis posée la question de savoir si j’avais bien lu. Après vérification en ajoutant mes lunettes sur le bout du nez, je confirme, tu as bien écrit cette phrase. En plus de vingt années de pratique, et d’autres d’enseignement, jamais je n’ai enseigné que le yoga rendait les gens immortels. Me serais-je donc trompée ?

Ni même que les professeurs de yoga ne pouvaient pas mourir ni d’un cancer, ni d’un infarctus. Il me semble alors qu’il te manque une certaine expérience en la matière, ce que je déplore vraiment. Vu ton compte et tes posts, on serait tenté de croire que tu es un expert, mais en fait je me rends compte que tu es le syndrome même de la coquille vide dans tous ses états. J’ai beau la retourner, je ne vois rien dedans. C’est dommage car tu as écrit plusieurs livres, et tu es quand même drôlement suivi sur les réseaux sociaux.

Derek Ireland est décédé d’un cancer à 42 ans. Rolf Naujokat est décédé à 70 ans, des suites d’une longue maladie et pourtant il vivait le Yoga tel un ermite. Maty Ezraty est décédée à 55 ans dans son sommeil. Non le yoga ne rend pas les professeurs de yoga, ni les pratiquants immortels. D’où te vient cette idée saugrenue ?

Pour une raison que j’ignore complètement, tu t’es senti en confiance avec moi, ou bien peut-être voulais tu mettre en avant tes connaissances et surtout ton opinion. Tu m’as ensuite envoyé ce message vocal, que j’ai retranscrit et que j’aimerai partager, pour que tout le monde puisse bien prendre le temps de le lire, de le comprendre, et surtout de capter les nombreux sous entendus que tu émets dans cette tirade, absolument majestueuse :

« Et en même temps ça c’est une vidéo qui a été postée sur son compte hier de lui. Moi je suis désolé quand je vois cet homme je ne vois pas un homme de 53 ans, je vois un homme qui a 10 à 15 ans de plus. Il est en surpoids, il n’a plus de cheveux enfin…. C’est aussi fou le nombre de profs de yoga qui ne s’imposent pas la vie de yoga comme ils l’imposent à leurs élèves, car moi je suis désolé, quelqu’un qui pratique le yoga tous les jours à 50 ans il n’a pas un corps comme ça, enfin. Voilà, je pense qu’il y a aussi ce problème là. Après il y a aussi le fait que c’est un indien et qu’il y a beaucoup d’indiens qui sont en mauvaise santé, déjà très jeunes, avec la pollution et tout ça, donc ils ont souvent des problèmes cardiovasculaires. Mais là quand même je suis assez choqué, j’ai vu cette vidéo qu’il a posté hier, il n’a pas du tout le corps d’un yogi de 50 ans. Non. Non. »

Pour corroborer tes dires et appuyer ton étude approfondie sur le sujet, tu as même eu l’audace, ou la délicatesse, à ce stade je ne sais plus trop quoi penser, de me faire parvenir la dernière vidéo de Sharath partagée sur son compte Instagram, dans laquelle il enseigne POUR LA DERNIERE FOIS à ses élèves, lors de son stage en Virginie. Tu as utilisé le DERNIER MOMENT de la vie de Sharath pour appuyer ton point de vue, que fondamentalement je n’avais pas envie d’entendre. Car ton avis, ton opinion, tes idées, ne m’intéressaient pas outre mesure. Et encore moins maintenant.

Ce à quoi j’ai mis un peu de temps à répondre car j’étais sidérée par la violence de tes propos et par ta démarche. Comment as-tu pu penser une seule seconde que j’allais abonder dans ton sens ? Tu pensais vraiment que j’allais te répondre « Ah oui, tu as raison, en Inde les indiens sont vraiment malades, et Sharath tu as raison il était gros et chauve »… Qui t’a donné le droit de me pondre ce genre de message vocal, que tu as eu la faiblesse, probablement par lâcheté, d’effacer, suite à mes deux autres messages vocaux, dans lesquels je t’exprime mon étonnement et où je souligne à quel point tu es en fait, très, très superficiel.

Puisque tu as partagé ce point de vue et ton avis royal, après avoir surfé gentiment sur l’hommage que tu faisais, probablement pour recevoir de ta communauté aveugle qui te suit tel des labradors, recevoir un peu de sympathie, ou bien te faire dorer le blason je ne sais pas trop, je t’ai donc encouragé à partager tes propos en story. Histoire de voir quel retour tu pourrais avoir.

Sur ce, tu as répondu par trois messages vocaux, où tu parais un peu essouflé j’avoue, peut-être as-tu compris que tu venais de rencontrer un mur ? Peut-être que tu t’ai dit « ah mais en fait Stéphanie elle en a sous le pied, elle n’est pas comme je le pensais, elle ne blaste pas gratuitement sur le dos des gens ». Non je ne fais pas ça. J’ai connu une professeur de Yoga qui passait son temps à m’envoyer des vidéos de profs qui, selon elle, faisaient n’importe quoi, dont une vidéo où elle critiquait vertement une prof d’Ashtanga, prof avec qui elle a fini par devenir hyper copine en suivant sa formation par ailleurs. Je ne suis pas de cette veine là. Je ne suis pas non plus opportuniste.

Quand j’apporte un jugement, ou une critique, déjà je le fais publiquement en expliquant pourquoi je trouve que certaines choses ne me plaisent pas, je me suis pris des critiques en pleine face que j’ai assumées, mais jamais je ne descends gratuitement, par méchanceté, jalousie, ou besoin de briller. J’essaie de rester droite dans mes chaussures.

Toi en revanche c’est une autre histoire. Tu as un très bon réseau artistique qui te permet visiblement de gravir les échelons de la notoriété dans le petit monde du yoga. Tu assois une certaine popularité et pourtant, seule la couverture est jolie. Le contenu de ton être est pauvre. Tu te poses en grand professeur de yoga, mais dans cet échange je ne vois rien de très « yogique ». Je vois qu’en revanche tu profites un peu de la mode, tel un gros colon. Les indiens sont souvent malades, et pourtant c’est bien en Inde que tu proposes des séjours ayurvédiques pour une communauté d’occidentaux. Quelle dichotomie entre le discours que tu viens de me faire, et l’image que tu représentes sur les réseaux sociaux.

Tu rames un peu dans les trois derniers vocaux que tu m’as envoyés. Tu as sans doute réalisé que tu avais fait une « boulette », d’où le fait que tu as effacé ton premier vocal et la vidéo. Mais le mal est fait. Tu as dévoilé ton vrai visage. Je trouve regrettable que la sphère du yoga mette plus souvent en avant les gens qui savent se vendre avant tout, ceux qui ont les bons contacts, ceux qui ont des comptes IG avec un nombre important d’abonnés. 

Ton premier message dans lequel tu juges qu’un professeur de yoga ne devrait ni être bedonnant, ni chauve, avec une discipline exemplaire, montre bien ta manière de pensée. Que penses-tu des professeurs de yoga qui ne font pas une taille 36 ? Quel regard portes tu sur eux ? Pas le regard lisse des réseaux sociaux, mais le tien, le vrai. Est-ce que certains présentent grâce à tes yeux de grand maitre qui sait tout et qui connait l’Inde mieux que personne ? Quel jugement portes-tu sur une personne qui enseigne et qui est très très très raide, ou très très très gros ? Ou peut-être moche ? Va savoir, est-ce que ça compte aussi dans ton petit monde du yogis parfaits, selon tes standards ? Si demain on me diagnostique un cancer, est-ce que ce sera de ma faute parce que je n’ai pas suivi les yamas et niyamas avec rigueur ? 

Et maintenant revenons à ton cas. Toi qui a étudié les sciences indiennes, on appelle comment un type qui porte un jugement sur une personne simplement basée sur son apparence ? Est-ce que c’est faire preuve de profondeur ce genre de raisonnement ?

J’espère que tu liras cette lettre. Je ne te souhaite pas de comprendre mon point de vue, je ne sais pas si ton ego peut l’accepter. Mais je te souhaite de pratiquer un peu plus ouvertement les techniques dites de yoga, car tu es loin, très loin, d’être expert en la matière.


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1 réflexion sur “Lettre ouverte au professeur de yoga”

  1. Quel monde superficiel, et quels mots inaudibles au lendemain de la mort de cet homme qui s’est dédié au yoga et à la transmission depuis jeune. Je suis tellement choquée par cette phrase aussi: «  C’est aussi fou le nombre de profs de yoga qui ne s’imposent pas la vie de yoga comme ils l’imposent à leurs élèves, car moi je suis désolé, quelqu’un qui pratique le yoga tous les jours à 50 ans il n’a pas un corps comme ça. » . Mais de quel droit? Mais quelle ignoble insulte. Qu’en sait-il? Et encore une fois comment pourrait-on douter de l’engagement de Sharath Jois? Wahhhh c’est stratosphérique comme pensée et apparemment cette personne est très suivie. Nan mais quel est ce monde où règne le superficiel, les apparences (être chauve et en surpoids 🤣😂.. quelles bassesses ces remarques stupides!) monde dans lequel certains profitent de leur « aura » de pacotille pour briller.
    Je finirai donc par cette citation que j’adore et qui me semble si à propos et correspondre à ce personnage ; « C’est parce que la vitesse de la lumière est supérieure à celle du son que certains sont brillants avant d’être con ! »
    Merci Stephanie pour ces franchises et coup de gueule parfois ! 🙏🏻

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